Mais quelle est cette urgence à flinguer toujours plus, toujours plus tôt ? Cette année encore, malgré l’obligation de prudence sanitaire, nos campagnes et montagnes risquent de subir l’invasion des chasseurs dès le 1er juin.
Aucun conseil scientifique sérieux n’a bien sûr été consulté pour justifier de la nécessité de la reprise précoce des tueries contre la faune en pleine pandémie : au contraire, le gouvernement poussé par le lobby chasse a même profité de la crise du Covid-19 pour assouplir les procédures de fixation des périodes cynégétiques !
Face à ce nouveau scandale, une pétition soutenue par plusieurs associations a été lancée, pour demander l’annulation de la chasse d’été.
Chasser dès le 1er juin n’est bien sûr pas une nouveauté de 2020. Mais cette ouverture anticipée qui concerne la majorité des départements français* n’était jusqu’à récemment pas très connue du grand public. C’est « grâce » au projet de décret relatif au grand gibier que cette disposition a été portée à la connaissance du plus grand nombre, en mars dernier ; en effet, de nombreuses associations dont l’ASPAS ont alerté sur la volonté du gouvernement de supprimer la procédure de demande d’autorisation individuelle de chasser, qui était jusqu’à présent obligatoire, pour tirer les chevreuils, sangliers et les daims en juin. Ne nous leurrons pas : cette simplification administrative (si elle est adoptée, la décision finale n’ayant pas encore été rendue publique) a pour seul but d’encourager davantage de chasseurs à ressortir les armes cet été !
Traditionnellement, la majorité des chasseurs préfère attendre l’ouverture générale de septembre pour remettre leurs casquettes orange-fluo. Mais ces derniers mois, pour contrebalancer l’érosion inéluctable qui affecte leurs rangs, des mesures ont été prises pour allonger les périodes de chasse… C’est ainsi que le décret prolongeant la chasse au sanglier jusqu’au 31 mars a été entériné en février de cette année. Heureusement, grâce au confinement, les tueries ont été stoppées deux semaines plus tôt que prévu… avant de reprendre sporadiquement un peu partout en France sous d’autres formes, à mesure que les préfectures ont adopté des arrêtés dérogatoires au confinement pour autoriser diverses « destructions » contre des corvidés, des renards, des sangliers, et d’autres animaux considérés comme « nuisibles » (battues adopté des arrêtés dérogatoires.
Un nouveau massacre de renards en perspective
En plus de la barbarie du déterrage, dénoncée par l’ASPAS depuis des décennies, à la belle saison les chasseurs profitent des journées plus longues et de la plus grande activité des renards dans les champs pour les tirer au fusil (à l’’approche ou à l’affût). En effet, si la chasse d’été ne concerne théoriquement que les chevreuils, les sangliers et à moindre mesure les daims, une petite disposition scélérate du code de l’environnement (mais très lourde de conséquences !) précise que « toute personne autorisée à chasser le chevreuil ou le sanglier avant l’ouverture générale peut également chasser le renard dans les conditions spécifiques figurant au même tableau pour le chevreuil et pour le sanglier »…
Les renards, à la recherche de nourriture facile, sont donc particulièrement vulnérables en été, saison des moissons. Or en les tuant, les chasseurs augmentent en réalité les risques de dégâts agricoles, puisqu’ils suppriment l’un des prédateurs naturels des campagnols qui déciment les cultures encore sur pied ! Volontiers charognard, le renard joue également un rôle de nettoyeur de la nature, en consommant des cadavres d’animaux ou des animaux malades.
Les tueries des chasseurs génèrent également un problème sanitaire, maintenant que l’on sait que la présence des renards permet de freiner la propagation de la maladie de Lyme, largement véhiculée par les tiques accrochées aux rongeurs.
Des raisons d’espérer ?
Après des années de lutte pour demander la protection du renard, les mentalités évoluent doucement mais sûrement. Le renard est hélas toujours classé « susceptible d’occasionner des dégâts », mais les citoyens du 21e siècle ne comprennent plus cette classification, et le monde agricole prend de plus en plus conscience de l’utilité de goupil pour leur activité.
Ne baissons pas la garde ! Les clichés ont la vie dure, et goupil a encore largement besoin de notre soutien. La pétition « Renards, nuisibles vraiment ? », portée par l’ASPAS, Anymal et One Voice est maintenant forte de plus de 380 000 signatures ! Ne nous arrêtons pas en si bon chemin : si chacun des signataires parvenait à faire signer ne serait-ce qu’une seule nouvelle personne de son entourage, nous serions à plus de 600 000, soit à peu près l’équivalent du nombre de renards tués chaque année en France !
* Les arrêtés relatifs aux dates d’ouverture et de fermeture de la chasse dans chaque département ne sont pas encore adoptés à l’heure où nous écrivons cet article. Idem pour les résultats des nombreuses consultations publiques auxquelles nos associations ont appelé à participer.